« Autour de nous tournent des satellites. L’homme a marché
sur la Lune. Il a envoyé des sondes vers les autres planètes,
n’est-ce pas ? Il a fallu que quelqu’un rêve ce rêve,
et que tous ces grands écrivains
de l’âge d’or et des trente dernières
années éveillent l’intérêt des gens
pour qu’il devienne réalité. »
L. Ron Hubbard

Une introduction à la science-fiction
de L. Ron Hubbard
(suite)

Lorsque vous mêlez la science-fiction et le fantastique, vous n’obtenez pas un genre pur. L’un et l’autre, pour le professionnel, sont distincts. J’ai remarqué qu’il existe actuellement une tendance à les mélanger et à baptiser le résultat « fiction imaginaire ». En fait, ils ne se mêlent pas bien : la science-fiction, pour être crédible, doit se fonder sur un certain degré de plausibilité ; alors que le fantastique ne connaît pas de limites. La science-fiction exige beaucoup de soin de l’écrivain, alors qu’écrire du fantastique, c’est se promener en liberté dans un parc. (Un personnage se balade les mains nues. Hop ! le voilà avec une épée magique.) Ce qui ne veut pas dire que la science-fiction soit meilleure que le fantastique. Ces deux genres, du point de vue des spécialistes, sont très différents, voilà tout !

Mais il y a plus : la science-fiction, surtout durant son âge d’or, avait une mission. Je ne puis bien sûr parler au nom de mes amis de cette période. Mais lorsqu’on fréquentait Campbell, qu’on était « dans le bain » avec les autres écrivains, on acquérait l’impression très nette qu’ils battaient vraiment le rassemblement pour la conquête des étoiles par l’Homme.

Au début de cette époque, la S. F. était considérée comme une sorte d’affreux bâtard dans le monde de la littérature. Bien pis, la science elle-même ne bénéficiait d’aucune subvention gouvernementale, d’aucun soutien. Il fallait que l’intérêt du public soit considérable avant que les politiciens ne débloquent les fonds nécessaires pour mettre en branle un projet.

Les écrivains de l’équipe de Campbell étaient plutôt des stars. C’étaient de très grands noms de la science-fiction. Ils améliorèrent la qualité littéraire du genre et furent à la base du boom qu’il connut.

« La science-fiction, pour être crédible, doit se fonder sur un certain degré de plausibilité ; alors que le fantastique ne connaît pas de limites. »

Environ un an après le début de l’âge d’or, je me souviens d’avoir rendu visite au département scientifique d’une très grande université. J’avais besoin de quelques renseignements en cytologie pour mes propres recherches. On me reçut très courtoisement et, tandis que l’on me montrait les textes que j’étais venu consulter, je m’aperçus que la pièce s’était peu à peu remplie, non d’étudiants mais de professeurs et de doyens. La nouvelle de ma visite au département de biologie s’était répandue et, en l’espace de quelques instants, je me retrouvais entouré de visages rayonnants, serrant des mains. Et que voulaient-ils savoir ? Ce que je pensais de telle ou telle nouvelle ? Quels auteurs avais-je rencontrés récemment ? Comment allait Campbell ?

Ils avaient leur littérature ! La science-fiction !

Et ils en étaient fiers !

Pour un temps, avant et après la Seconde Guerre mondiale, je restais en contact permanent avec cette nouvelle génération de scientifiques, ceux qui mirent au point la bombe, ceux qui commençaient à toucher aux fusées. Tous étaient des amateurs de science-fiction. Et un grand nombre de savants parmi les meilleurs écrivaient aussi de la science-fiction.

En 1945, je participais à une réunion d’anciens amis scientifiques et auteurs de science-fiction. Cela se passait chez mon vieil ami Robert Heinlein. Et savez-vous ce qu’il y avait au programme ? Comment envoyer l’Homme dans l’espace suffisamment vite pour qu’il se désintéresse des guerres sur la Terre. Et ces gars-là étaient écoutés par le gouvernement et avaient le pouvoir de le faire ! Nous y parviendrons bientôt. Les scientifiques ont réussi à envoyer des hommes dans l’espace et ils ont même obtenu la coopération des Russes pendant quelque temps.

On ne peut être assez naïf pour continuer à dire que tout arrive par accident, que les événements s’enchaînent tout seuls, qu’il y a un ordre naturel des choses et que tout finira bien d’une façon ou d’une autre. Ce n’est pas de la science. C’est croire au destin, à la fatalité, et nous revoilà dans le monde du fantastique. Non, les choses sont planifiées. L’âge d’or de la science-fiction, qui commença avec Campbell et Astounding Science Fiction, éveilla suffisamment l’intérêt du public et rassembla assez de lecteurs pour aider à lancer l’Homme vers l’espace. De nos jours, les plus grands savants parlent comme nous parlions autrefois.

« L’âge d’or de la science-fiction, qui commença avec Campbell et Astounding Science Fiction, éveilla suffisamment l’intérêt du public et rassembla assez de lecteurs pour aider à lancer l’Homme vers l’espace. »

Campbell a fait ce qu’il a entrepris de faire. Aussi longtemps qu’il eut sa première femme auprès de lui et tous ses amis pour lui rappeler que la science est faite pour les gens, qu’il était inutile d’envoyer des machines pour le plaisir d’envoyer des machines, qu’il était absurde d’aller dans l’espace si la mission n’avait aucun rapport avec l’humanité, il gagna. Car c’était un homme très brillant et un rédacteur très patient et compétent. Quand Donna, sa première femme, le quitta en 1949 (elle épousa George O. Smith), quand il n’eut plus son vieil entourage pour l’inciter à mettre des personnages dans les récits, quand il n’eut plus son ancienne équipe d’auteurs autour de lui, il laissa régresser son magazine, et son règne s’acheva quand le titre devint Analog. Mais c’était l’âge d’or qui avait tout démarré et Campbell a bel et bien gagné après tout.

Lorsque j’ai commencé ce roman, je voulais écrire de la science-fiction pure. Et pas dans la vieille tradition. La forme et le style ont changé, je devais donc me mettre au goût du jour, moderniser le schéma et le ton de l’histoire. Afin de montrer que la science-fiction n’est pas science-fiction à cause d’un type d’intrigue particulier, ce roman regroupe pratiquement tous les genres – policier, espionnage, aventure, western, amour, guerre, tout ce que vous voulez. Tout sauf du fantastique. Il n’y en a pas. Le terme de « science » recouvre tout aussi bien l’économie, la sociologie et la médecine lorsqu’elles se rapportent à des choses matérielles, et vous les trouverez aussi dans ce roman.

Pour des raisons de format, les rédacteurs des magazines obligent l’auteur à respecter certaines longueurs. J’ai su le faire. C’est un tour à prendre. Mais cette fois, j’ai décidé de ne rien couper et de laisser rouler. Aussi il est possible que j’aie écrit le plus volumineux roman de S. F. Les spécialistes du genre – et je vous ai dit qu’ils sont nombreux – pourront vérifier.

Certains de mes lecteurs se demanderont peut-être pour quelle raison je n’ai pas inclus mes propres préoccupations. Je ne l’ai pas fait avec la pensée de les renier. C’est simplement que j’ai mis ma vieille casquette d’écrivain professionnel. Et je ne voulais pas donner l’impression que j’avais écrit ce livre dans un souci de publicité pour mes travaux plus sérieux.

Et puis il y a ceux qui regarderont ce livre et diront : « Vous voyez ? On vous avait bien dit que ce n’est qu’un écrivain de science-fiction ! » Eh bien, j’ai appartenu à l’équipe d’écrivains qui a aidé à lancer l’Homme vers les étoiles et je suis fier d’être connu comme auteur de science-fiction. Autour de nous tournent des satellites. L’Homme a marché sur la Lune. Il a envoyé des sondes vers les autres planètes, n’est-ce pas ? Il a fallu que quelqu’un rêve ce rêve, et que tous ces grands écrivains de l’âge d’or et des trente dernières années éveillent l’intérêt des gens pour qu’il devienne réalité.

J’espère que vous aimerez ce roman. C’est le seul que j’aie écrit pour me distraire. Il marque également mes noces d’or avec la muse. Cinquante ans de carrière : 1930 – 1980.

En tant que professionnel en la matière, je peux vous assurer que c’est de la science-fiction pure. Pas du fantastique. De la science-fiction, en tout point. La science est faite pour l’Homme. De même que la science-fiction.

Prêt ?

Attachez vos ceintures.

On décolle !

 

– L. Ron Hubbard, octobre 1980